Un mot de Lucy
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Il y a environ 10 ans, on m’a demandé de chanter des chansons de Kurt Weill avant une projection de L'Opéra de quat'sous de G.W. Pabst, accompagnée par un pianiste de 85 ans. Il s’avéra qu’il ne connaissait que La Complainte de Mackie, donc j’ai chanté la moitié des chansons a cappella et nous avons concocté une liste d’autres chansons vaguement berlinoises.

Depuis cette première tentative, j’ai eu envie de faire quelque chose autour du merveilleux travail de Kurt Weill. Je trouvais intriguant et séduisant tout ce qui était connecté à la République de Weimar et au style Brecht/Weill.

Au début de l’année dernier, le confinement enfin levé, je suis allée à un concert au Cave Café à Montmartre, donné par mon ami Perry Leopard et un accordéoniste que je ne connaissais pas encore, Hubert de Leusse.

J’ai été particulièrement intriguée par leur version de La Complainte de Mackie, que Perry a chanté en lisant les paroles sur son portable, et ce moment avait quelque chose de dramatique, de hautement théâtral et d’assez Brechtien : l’audace, la lumière bleue du téléphone portable éclairant son visage, ce personnage génial, l’accordéon évocateur. Au moment même, je me suis décidée à lancer un projet à nous trois, basé sur le répertoire de Kurt Weill, pas comme un concert, mais comme une pièce de théâtre. Nous sommes entrés dans une phase de création musicale fructueuse, et au printemps de l’année dernière, nous avons fait une répétition publique. Puis en mai et juin, nous avons donné deux représentations d’une version plus travaillée à laquelle nous avions ajouté du texte et quelques idées de mise en scène ; un simple décor avec des lumières basses qui créaient un jeu d’ombres inquiétantes sur les murs. 

La réaction fut étonnante. Une sorte de ravissement, des regards pleins d'étoiles, accompagnés de cette affirmation : « C’était excellent ! Vous devez en faire quelque chose ! »